Est ce parce que je travaille la semaine à Orléans et que je passe mes week end à Paris, que j'habite une petite maison dans l'une et un grand appartement dans l'autre, que j'ai des collègues dans l'une et des amis dans l'autre, des contacts sociaux dans l'une et une relation amoureuse dans l'autre, que j'ai parfois l'impression, sans être schizophrène, d'avoir deux vies et d'être complémentaire de moi-même ?
En tous les cas, mes activités sont différentes et j'apprécie certaines choses qui m'ennuieraient très certainement dans l'autre cas.
Par exemple, ce dîner, mardi soir, chez un collègue avec son épouse que j'ai dénommée "miss Che"
Soirée petits bourgeois : Monsieur est directeur de banque et Madame est médecin.
Plus âgée que lui et mère d’une fille qu’ils n’ont pas eu ensemble, elle est originaire de la Région. Femme à l'allure, une tenue chic et décontractée, elle a un léger chuintement dans la voix qui lui donne ce côté « bon ton » d’Orléans.
La maison sur rue, de facture classique, cache sur l’arrière une véranda construite plus tard et un jardin de 300 m2. La nuit tombée, il disparaît. Le mobilier, sans relief, sans époque, sans style, démontre que la maîtresse des lieux habite ce lieu depuis longtemps. Au cours de la conversation, elle avouera y habiter depuis 15 ans.
La conversation agréable et sympathique tournera autour des sujets du moment : la voiture classe M, les jalousies des "locaux", les vacances à Méribel, leur dernier voyage à Salzbourg ou leurs week end dans leur maison de Dinard. J’évoquerais pour ma part une vie parisienne « édulcorée « qui fascine miss « che » par son envie d’y vivre (7ème ou 16ème) et son goût pour le luxe. Alertée par son mari, elle aura la curiosité d’une petite fille à prendre en main ma montre Chanel, comme un objet rituel.
La soirée s’écoule tranquillement, sans lenteur ou silences angoissants, comme de vieux amis retrouvés.
A minuit trente, nous nous quittons par de grandes embrassades et l’envie de Miss « Che » de nous revoir. Le mari, fier de son épouse, de sa vie bourgeoise, de la réussite de notre rencontre marque de grands sourires et des yeux bleus illuminés.
Un décalage pour moi, comme un épisode de la 4ème dimension, un monde parallèle et pourtant proche.
Les commentaires récents